L’article 604 du Code de Procédure Civile dispose :
« Le pourvoi en cassation tend à faire censurer par la Cour de cassation la non-conformité du jugement qu’il attaque aux règles de droit. »
Classiquement, la Cour de Cassation est une juridiction qui ne sanctionne que les erreurs de droit des différentes juridictions, ces dernières bénéficiant d’une souveraineté quant à l’appréciation du cas d’espèce qu’elles doivent juger.
Pour autant, on peut légitimement s’interroger si parfois, les magistrats de la Cour de Cassation n’anticipent pas, certes à « pas mesurés », la mise en place d’un contrôle de proportionnalité, que certains praticiens et commentateurs appellent de leurs vœux.
Le sport a récemment donné une très bonne illustration de cette situation.
La Cour de Cassation a ainsi été amenée à se pencher sur le licenciement pour faute grave d’un entraineur de basket-ball.
On le sait, en matière de sport professionnel, les contrats de travail des joueurs et de leurs entraineurs relevaient, jusque très récemment, du CDD d’usage.
A l’instar de tout CDD, les motifs de rupture anticipée de ce dernier sont limitatifs et d’ordre public, à savoir :
- La rupture d’un commun accord
- La faute grave
- L’inaptitude
- La force majeure.
Il convient de rappeler que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise.
Dans le cas d’espèce, après un coup de colère et le renvoi au vestiaire d’une de ses joueuses, un entraineur de basket-ball a vu son contrat de travail rompu pour faute grave.
Les juges du fond ayant estimé que cette rupture était abusive, le club employeur a formé un pourvoi en cassation.
Le club critiquant l’appréciation des faits de la Cour d’Appel, la Cour de Cassation aurait pu légitimement se contenter de rejeter ce moyen en renvoyant à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Or, justement, la Haute Cour a pris le soin d’analyser les circonstances amenant à la rupture:
« Mais attendu qu’ayant relevé, d’une part, que le renvoi aux vestiaires d’une joueuse de l’équipe, sans propos vexatoires ou blessants, et les gestes d’énervement reprochés au salarié devaient être replacés dans le contexte du sport de haut niveau et des compétitions sportives, et d’autre part, que l’intéressé versait aux débats de nombreuses attestations faisant état de son professionnalisme et de ses qualités humaines, la cour d’appel, qui a examiné l’ensemble des griefs invoqués dans la lettre de rupture du contrat de travail, a pu décider que la faute grave n’était pas caractérisée »
Ainsi, si la chambre sociale valide l’analyse de la Cour d’Appel, elle reprend à son compte les éléments factuels que cette dernière a développé et procède ainsi indirectement à ce contrôle de proportionnalité.
Cet arrêt, certes non précurseur, ouvre malgré tout des perspectives qui pourraient amener le législateur à faire évoluer la loi ; et ainsi permettre aux magistrats de la Cour de cassation, à l’instar de certains de leurs homologues européens, d’opérer un contrôle plus prononcé des arrêts des juridictions d’appel.
Cass. Soc. 25 novembre 2015 n°14-17446
Département Droit du Sport
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