Civ. II 20 décembre 2018 n°17-26921

☞ Ce qu’il faut retenir:

Il n’est pas possible pour une association sportive gérant le centre de formation d’un club sportif professionnel, d’appliquer le mécanisme de l’assiette forfaitaire de cotisations de Sécurité Sociale prévu par l’arrêté  du 27 juillet 1994 aux sommes versées pour les mineurs de moins de 16 ans, accueillis au sein du club dans le cadre d’une convention de préformation.

 Pour approfondir

A l’occasion d’un vaste contrôle national des clubs de football professionnels mené par l’URSSAF, l’association Football Club des Girondins de Bordeaux s’est vue notifier un rappel de cotisations du chef de l’application erronée selon l’URSSAF, du mécanisme de l’assiette forfaitaire des cotisations de Sécurité Sociale, aux sommes versées pour les mineurs de moins de 16 ans accueillis au centre de formation dans le cadre d’une convention de préformation.

Le club de Bordeaux considérait que les gratifications qui étaient versées au sein de l’association amateur, support du club professionnel, à destination des jeunes joueurs de moins de 16 ans, sous convention de formation et ayant vocation à intégrer le centre de formation du club, pouvaient bénéficier du mécanisme d’assiette forfaitaire de cotisations prévu pour les personnes exerçant une activité rémunérée liée à l’enseignement ou à la pratique d’un sport dans le cadre d’une association de jeunesse ou d’éducation populaire agréée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports.

Pour sa part, l’URSSAF estimait qu’un stage de formation ou une alternance  professionnelle au sein d’une association sportive, ne constituait pas l’exercice d’une activité rémunérée liée à l’enseignement ou à la pratique d’un sport permettant de bénéficier de l’assiette forfaitaire de cotisations sociales.

Par l’arrêt commenté, la Cour de Cassation approuve la Cour d’appel d’avoir validé le redressement et privilégie  le fait que ces jeunes, avant 16 ans, dans le cadre de ce stage de formation rémunéré, continuaient parallèlement de suivre une scolarité obligatoire.

Dès lors ils ne pouvaient être considérés comme exerçant une activité rémunérée même si, en pratique, les gratifications versées par les associations sportives support des clubs professionnels, pour des joueurs entre 14 et 16 ans, dans le cadre de ses conventions de pré formation peuvent parfois déjà être relativement importantes.

Cet arrêt est l’occasion de rappeler l’existence en matière sportive, des mécanismes d’assiette forfaitaire et de franchise de cotisations sociales qui peuvent permettre aux clubs sportifs d’opérer des économies substantielles, mais doivent être utilisés avec vigilance.

Le mécanisme d’assiette forfaitaire de cotisations sociales est issu d’un arrêté du 27 juillet 1994 qui permet aux clubs sportifs, ou à un organisateur de manifestations sportives, de ne payer les cotisations de Sécurité Sociale que sur une assiette forfaitaire, et non sur la totalité de la rémunération versée.

Ainsi, pour les rémunérations inférieures à 45 smic horaire, l’assiette forfaitaire correspond à 5 smic horaire, pour les rémunérations situées entre 45 et 60 smic horaire l’assiette forfaitaire correspond à 15 smic horaire, etc…jusqu’à une assiette forfaitaire de 50 smic horaire pour une rémunération mensuelle située entre 100 et 115 smic horaire.

L’adoption de ce dispositif a eu pour but de privilégier les déclarations d’embauche officielles  même  sur des faibles rémunérations ( temps partiel…) et  d’éviter les tentatives pouvant exister au sein de certains clubs ou associations sportives, de ne pas déclarer les salariés embauchés pour de faibles volumes horaires, préférant des paiements sous forme de frais de déplacement parfois fictifs, ou autres mécanismes de contournement.

A noter cependant : ce mécanisme d’assiette forfaitaire  ne s’applique qu’aux personnes exerçant dans le cadre d’organismes à but non lucratif, dont pouvait, dans l’arrêt commenté, faire partie de l’association loi 1901 gérant le secteur amateur du club professionnel.

Dans le même ordre d’idée, une circulaire interministérielle du 28 juillet 1994 permet aux clubs sportifs de verser certaines sommes en franchise de cotisations, aux sportifs ou aux personnes qui participent ou assument, des fonctions nécessaires à l’encadrement et à l’organisation des manifestations sportives pour le compte des clubs ou des organisateurs (guichetiers, billettistes, accompagnateurs, collaborateurs occasionnels;  les arbitres disposant eux de leur propre mécanisme d’exonération en application de l’article L.241-16 du Code de la Sécurité Sociale.)

Ainsi dans la limite de 5 manifestations par mois, une somme correspondant en 2019 à 130 euros par manifestation, peut être versée en exonération de cotisations.

Cette exonération ne concerne pas les cotisations AGS et assurance  chômage si le bénéficiaire  perçoit parallèlement  un salaire soumis à cotisations au sein du club.

Ce mécanisme est utilisé par de nombreux « petits »  clubs pour gratifier certains sportifs ou employés occasionnels,  puisque cette mesure est réservée à ceux  employant moins de dix salariés permanents à l’exclusion des sportifs eux-mêmes.

Attention cependant : ce mécanisme de franchise de cotisations  ne s’applique pas aux membres du corps médical et  paramédical, aux professeurs, moniteurs et éducateurs sportifs chargés de l’enseignement du sport, ni aux personnels administratifs desdites structures.

Les deux mécanismes (assiette forfaitaire et franchise) peuvent se cumuler.

D’une manière générale, comme en témoignent de réguliers redressements, ces dérogations sont appréciées strictement par l’URSSAF et les juridictions, de sorte que même si elles apparaissent évidemment utiles et favorables aux clubs sportifs, elles doivent être maniées avec prudence.

L’Equipe Droit du Sport

DERBY AVOCATS

A rapprocher : CA  TOULOUSE 19 mai 2017 n° 14/03922