La relégation demandée par le club ne peut lui permettre de rompre les contrats de travail des joueurs qui prévoyait un renouvellement en cas de maintien dans un championnat
De manière quasi systématique les clubs embauchant un sportif prévoient dans le contrat de travail diverses clauses qui tendent à suspendre son entrée en vigueur à la survenance plusieurs conditions.
On retrouve ainsi très souvent dans les contrats de travail la condition de satisfaire avec succès au passage d’une visite médicale, de l’homologation du contrat par les instances fédérales, ou encore de la qualification du club à participer dans un championnat d’un niveau prédéterminé etc…
Ces conditions suivent le régime civiliste de la condition suspensive.
De manière liminaire il doit être rappelé que si le contrat de travail connaît un début d’exécution, quel qu’il soit, les parties sont réputées avoir renoncé à toutes les conditions suspensives que le contrat de travail avait pu prévoir.
La simple participation du joueur à un entrainement suffit à matérialiser le début d’exécution du contrat.
Aussi, peu importe que le contrat de travail ne soit finalement pas homologué, ou que le joueur n’ait finalement pas satisfait à toutes les exigences de visite médicale, le contrat de travail se trouve valablement formé et le club doit assurer la rémunération du joueur (Cass. Soc, 1er Juillet 2009, n°08-40023. Cass. Soc. 17 mars 2010 n° 07-44468 ; CA Colmar, ch. soc., 10 février 2015, n° 15/0178).
On peut penser que le versement de la rémunération par l’employeur (salaire, mise à disposition d’un logement, mise à disposition d’un véhicule), ou encore l’utilisation de l’image du joueur par le club sont également susceptibles de caractériser un début d’exécution du contrat.
Pour ce qui touche à l’application des principes de droit civil à la matière sportive, outre la potestativité éventuelle de la condition qui peut la rendre nulle, la condition est réputée accomplie lorsqu’il apparaît que c’est le débiteur qui en a empêché la réalisation (article 1304-3 du Code Civil).
En d’autres termes, si le club ne met pas tous les moyens en œuvre pour que la condition puisse être réalisée, le contrat de travail est réputé valablement formé.
Ce principe juridique est essentiel à la protection du sportif professionnel.
En effet, il peut arriver qu’un club s’engage à recruter un joueur avant de finalement lui en préférer un autre dont il estimerait la valeur sportive supérieure.
Il a ainsi pu être jugé que le club ne peut se prévaloir du défaut d’homologation du contrat de travail s’il n’a pas fait le nécessaire pour le transmettre aux instances fédérales (Cass. Soc, 13 mai 2003, n°01-42068 ; CA AGEN 10 novembre 2015, n°14/01457), ou encore s’il n’a pas organisé la visite médicale du joueur dans les délais et selon les conditions fixées par le contrat de travail ou la convention collective.
Faisant application des mêmes principes, la Cour d’Appel de POITIERS a récemment rendu deux arrêts sanctionnant un club qui avait rompu les contrats de joueurs qui prévoyaient un renouvellement des contrats pour une année à condition que l’équipe première se maintienne dans le championnat National.
La Cour d’Appel a ainsi relevé que seule une relégation sportive et éventuellement administrative suite à une décision des instances fédérales, auraient pu empêcher la réalisation de la condition.
Or en l’espèce, la Cour a constaté que c’était le club lui-même qui avait pris la décision de ne pas réinscrire son équipe première en National (au motif du retrait d’un de ses partenaires commerciaux) alors qu’elle avait obtenu les résultats sportifs pour s’y maintenir, et qu’elle n’avait fait l’objet d’aucune sanction par les organismes de contrôle de gestion de la Fédération Française de Football.
La juridiction a donc naturellement conclu que c’était l’employeur qui avait délibérément empêché la réalisation de la condition suspensive laquelle s’en trouvait par voie de conséquence réputée accomplie.
Le club est donc condamné à verser aux joueurs des dommages et intérêts équivalent aux sommes qu’ils auraient perçus si leur contrat avaient normalement été renouvelés (CA Poitiers, 27-09-2017, n° 16/02165 et n° 16/02164).
L’Equipe Droit du Sport
DERBY AVOCATS